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Nigéria Blues !

WebHuit courtes années plus loin, à peine, voilà que « ça » recommence, niveau antiques « relations » tissées avec le continent Africain. Retour sur LE précédent par excellence : LE France-Togo de 2006 !

Extraits tirés de :
« Et Pourtant Elle Tourne… Rond ! »
(Et Rond, Et Rond, Petits-Ponts, Crampons !).
Nouvelle écrite en « temps réel » autour de la Coupe du Monde de Football (en short)
2006, en Allemagne !

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1er Tour : Vendredi 23 juin à Cologne.

Togo-France : 0-2

La pression est trop forte ici-bas. Tout le monde effectue un consternant retour vers le passé : capable des pires humeurs, option geysers de bile inondant les parois stomacales en interne.

Effrayés à l’idée de revivre le traumatisme de la Coupe du Monde en Corée et au Japon de

2002 (l’élimination des Bleus au premier tour) les gens ouvrent puis effeuillent des volailles, achètent des amulettes, multiplient ou empilent les colifichets « Bleu, Blanc, Rouge ».

Tête basse, ils s’accrochent au moindre signe positif, ravivent le fantôme des fameuses et honnies épopées coloniales : « les Togolais jouent en France, sont payés par nos clubs, habitent ici, profitent de nos avancées démocratiques et médicales, de notre modernité, ils sont à nous, à nous, à NOUS ! ».

Autre signe positif, à n’en pas douter, Zidane ne sera pas là cette fois et il ne peut décemment finir sa carrière comme cela. Quant aux Danois, eux (les Togolais de l’époque) ils étaient grands, blonds, autonomes, et jouaient en rouge. En rouge. Que du bon en perspective, donc.

Ayant décidé de souffler un peu, de fuir sur le champ analyses et angoisses médiatiques castratrices, j’opte pour un thé à prendre en terrasse, en centre ville Massilien.

Là, bien malgré moi – et à mon corps défendant – je dresse l’oreille et me recroqueville de douleur sur ma chaise : dévasté par un dialogue de bas étage attaché à la couleur « pas tricolore » de nos « gens de couleur ». En notre « onze », en somme, point de bruns et blonds, ou autres roux plus rares, non, que nenni, rien que du marron sale, du sombre et puis du noir… Étonnant non ?

Après une longue course éprouvante, menée au travers des ruelles, rues et avenues phocéennes, je finis par me réfugier au sein d’un magasin familier afin que d’y reprendre ma respiration en musique. C’est pourtant là qu’y résonnera, le pitoyable et bas du front : « Y’a trop de noirs dans l’équipe. C’est nous, le Togo ! D’ailleurs, comment ils vont faire pour se reconnaître ou savoir qui est avec qui. Tu leur mets le même maillot, et, à part Barthez, Sagnol ou Ribéry, tu sais plus qui joue avec qui ! ».

Alors que l’ensemble de mon épiderme enfle de dix bons centimètres, voilà que ça re-belote sans retenue : « En plus, y’en a pas un pour chanter La Marseillaise. Des mercenaires, je te dis, tout juste bons à toucher leur chèque, d’ailleurs… y’en a pas un qui joue en France ! Je t’assure que, s’ils ne sortent pas des poules, je débouche le champagne, oui, et du bon, tu me connais ! ».

Je m’approche lentement, espérant que cela freinera leurs ardeurs détestables, mais non, c’est pire encore et ça dévie même carrément pour tourner à l’aigre avec une insinuation des plus glauques concernant les tendances ou le « goût » présupposé de Domenech pour les « nègres » : « déjà en « espoirs », quand c’était lui qui entrainait, on n’arrivait pas à les compter tellement y’en avait ! ».

Je repars dans l’autre sens, reviens sur mes pas puis bifurque au tout dernier moment afin de ne (surtout) pas être suivi : zigzaguant de dextérité entre moches poubelles qui débordent et odorants tas d’immondices. Je finis par me trouver un espace, un interstice d’empathie en terrasse, pour y souffler un peu et reprendre lentement mes esprits chamboulés. Lors, voilà que ça recommence, que les bons mots fusent de toutes parts en fustigeant la galopante

« Togolisation » de notre équipe nationale. Avec, pour finir le travail entamé en amont, la mise en abîme finale : avec le côté « propre », « blanc », « beau et classe », des footballeurs Italiens, comparés à nos « gorilles » à nous, bien sûr, avec leurs « casquettes sur le côté », et tout le lourd et gras tralala habituel (dispensable, céans).

Fortement marqué par ces conversations successives, pourtant maintes fois entendues en ce coin d’Hexagone, mais qui me touchent encore et toujours comme au premier jour – au plus profond, au plus nauséeux à chaque fois – je décide de laisser tomber ma nouvelle pour devenir acteur, de cet événement planétaire :

« J’en fais le serment, je ferais tout ce qui sera en mon pouvoir ! Tout ce que je pourrais, pour les aider à aller le plus loin possible ; à la gagner, même, cette coupe, si besoin est ! ».

Mes talents de footballeur étant comparables à ceux d’un éléphant d’Asie juché au réveil sur des skis, je décide d’œuvrer tout autrement à la réussite de mes Français à moi.

Intègre et droit en mes tongs, je me refuse pourtant à me parjurer, à succomber au mal pour rejoindre, puis tomber, dans les filières parallèles : rites vaudous, envois de colis piégés, fortes sommes d’argent déposées sur des comptes anonymes afin que d’êtres ultérieurement distribuées aux arbitres, joueurs complaisants ou proches dans le besoin.

Refusant également l’embauche de femmes « faciles » destinée à ternir la réputation de certains joueurs adverses mariés ou fiancés, je creuse au plus profond de mes neurones en surchauffe. Penchant pour l’exécution d’une danse de la pluie à destination de la surface de réparation togolaise, au moment le plus (in)opportun, je me dois néanmoins de renoncer au tout dernier moment en mirant le ciel azur, parfait, dégagé (en dépit de mes efforts acharnés) et mes limites, en la sorcière matière…

Concentré comme jamais sur le Togo, je sens les idées naître et se presser, en fais l’inventaire, les répertorie méthodiquement.

Ces bons Français de souche voient encore très certainement les noirs (et autres peuples indigènes) au travers de la fameuse série des Tarzan tournée au début du siècle dernier.

Une époque où les blancs partent toujours à l’aventure nantis de l’équivalent d’une ville, niveau porteurs, pisteurs et traducteurs, mais finissent quoi qu’il arrive par rallier leur point de départ en petit comité, comblés et intacts, malgré les conditions pour le moins extrêmes, de leur folle embardée.

Tandis que, côté « blancs », ils s’en reviennent quasi, comme ils sont partis, à un ou deux personnages près – le méchant et le gentil le moins important pour la bonne poursuite du scénario – côté « nègres », c’est le plus souvent l’hécatombe, l’éradication pure et simple de la ville « levée » en amont, option génocide de masse. Peu ou presque plus de porteurs et guides ; juste le strict minimum, en somme, pour arriver à ramener à bon port les choses les plus pesantes, essentielles ou précieuses.

En y regardant de plus près, à la limite, cela pourrait ressembler à une sorte de rite initiatique pour « enfant blanc de bonne famille venu se déniaiser le système dans la jungle Africaine ».

L’équivalent du campement scout, de la « colo » ou des camps d’ados d’aujourd’hui, pour faire simple. Du côté des autochtones, par contre – écrasés par les éléphants, écrabouillés par des gorilles, avalés de vide ou transpercés par les flèches acérées des (encore) plus sauvages qu’eux – c’est tout de même l’interrogation qui prime. Ces « locaux » passent une grande partie du film à mettre le blanc en garde contre les multiples dangers de l’Afrique, mais finissent invariablement (bêtement) par y succomber eux-mêmes… Pathétique, non ?

Le point d’orgue de la série étant atteint au cours de cette scène de grimpette hallucinante, où, ployant sous les quartiers de roche lancés par des gorilles hargneux, les porteurs noirs tombent, les uns après les autres (en petites grappes fines, fines, fines) pour finir par s’écraser durement tout au bas de la montagne « sacrée ».

Une suite de chutes affreuses, qui n’émeut personne : ni les héros blancs, ni les gorilles ; pas même l’ensemble des autres porteurs ou l’œil précis, investigateur et gourmand, de la caméra qui filme tout (elle) dans les moindres détails. Pas plus que nous, donc, qui continuons à les regarder puis qualifier l’ensemble de « culte » !

Si les footballeurs de l’Équipe de France (les Bleus, donc) effectuaient le même type de culbute fatale – étant finalement remplacés sur le pré par les mêmes qu’eux, mais blancs, eux – c’est à se demander si cela ne ferait pas plaisir à certains de nos contemporains situés à la droite, de la droite, de la droite, de la droite, de notre électorat !

De plus en plus révolté, décidé à piétiner puis ventiler à jamais la fourmilière ainsi exhumée, je m’organise dans le calme, prépare la riposte.

Inspiré comme jamais, je phosphore longuement et triomphe dans la foulée. Je recouvre alors mes parties génitales de « tricolore », puis scanne mon intimité de la plus précise, de la plus chirurgicale, des façons. Ensuite, utilisant au mieux l’éventail sans limites de nos actuelles technologies, je décide d’en agrandir les dimensions sur ordi, jusqu’à l’innommable, jusqu’à l’insupportable – côté taille ET circonférence – puis envoie le tout par mail aux joueurs Togolais en me faisant passer pour un Blanc Bleu de la bande à Zizou !

Interloqués, perturbés (effrayés ?) par les dimensions hors du commun de mon engin

FRANÇAIS de séduction massive, ceux-ci s’effondreront, puis se rendront finalement sans affrontement, ou presque. Une heure et demie durant, ils courront aux quatre coins du terrain, tête basse et peur vrillée au ventre : cherchant uniquement à découvrir « qui », parmi nos Bleus à nous, pourrait bien être l’heureux propriétaire de cet organe de concours ô combien castrateur ! Ce faisant, lorgnant sans discontinuer sur Barthez, ou contenant les rares assauts de Franck Ribéry, Willy Sagnol et David Trezeguet – concentrés uniquement sur ce quatuor de pas « bronzé » – ils laisseront le champ libre à Patrick Viéra et Thierry Henry, qui en profiterons, eux, pour qualifier magnifiquement la France !

Épilogue :

Comblé, fier de mon œuvre, le soir, une fois le Vieux Port rallié, je parlerais à tort et à travers. Expliquant au monde en liesse, tout autour, quelle aura été la grandeur de mon unique exploit, et me vantant d’être LE stratège de l’équipe, je passerais ainsi, de table en table, bombant le torse en racontant mon histoire jusqu’à plus soif. Atteint au plus profond de ma chair par les rires gras et moqueurs qui fuseront alors de toutes parts, en provenance directe des gosiers alentour, je regagnerais finalement mon immeuble dans la nuit en rasant les murs, humilié, incompris et blessé.

Le lendemain matin, toujours meurtris, mais requinqué – quoique, manquant singulièrement de tact – je finirais par me brouiller, après avoir « tout avoué », avec mon plus vieil (et fidèle) ami africain ; pour une sordide histoire, de : « propos stupides, inconsidérés, s’appuyant sur de vielles légendes indignes de ta personne éduquée… mais digne, par contre, des vielles traditions colonialistes de la France et de ses pires excès passés ! Je ne te félicite pas, non,  jamais j’aurais cru ça de toi… » (sic).

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